Darquis habite dans un désert alimentaire. Il fréquente un organisme soutenu par Centraide qui l’aide à mieux se nourrir… et à briser son isolement social!
« Je m’appelle Darquis. Je vis dans le quartier depuis cinq ans. Il y a quelques mois, j’ai commencé à fréquenter La P’tite Maison pour essayer d’aider les gens et pour m’aider moi-même. Je me cache depuis des années, depuis mon accident, et j’avais besoin de sortir de mon isolement.
Je suis parti de chez moi quand j’avais 15 ans parce que je ne correspondais pas à la norme. J’étais un patineur artistique, danseur de ballet et musicien dans une petite ville de hockey et de baseball. J’ai parcouru tout le Canada. Je me suis d’abord installé à Toronto, où j’ai rencontré ma femme. Mais quand les loyers sont devenus beaucoup trop chers, nous avons décidé de nous installer au Québec.
J’ai eu un accident de travail majeur qui m’empêche de travailler. J’ai été écrasé par 800 kg de plexiglas. Puis, ma femme est morte et je me suis retrouvé seul avec mon fils. Elle était le centre de ma vie et de la maison. Je me suis senti si seul. Je me suis mis à me cacher dans mon sous-sol.
J’ai croisé une intervenante de La P’tite Maison dans une banque alimentaire. Elle m’invitait aux activités de l’organisme, mais je ne voulais pas. Après quelques mois d’insistance, j’ai finalement accepté. C’est incroyable! J’ai retrouvé une famille. C’est comme si j’étais rentré chez moi.
C’est nous qui décidons comment la maison est gérée. C’est pour ça qu’on a le goût d’y venir et de faire des choses. Quand j’ai commencé à travailler dans le jardin, on m’a dit : « Si tu as des idées, partage-les et nous t’aiderons à les réaliser. » En fait, grâce au jardin, j’ai l’impression d’être de retour au travail, d’avoir de nouveau un emploi. Je ne supporte plus de rester assis chez moi. J’ai l’impression d’avoir un but. Et je veux montrer à mon fils qu’il est possible de s’en sortir.
Ici, on est dans une zone où il n’y a rien à manger. Il n’y a aucun marché d’alimentation dans le quartier. Les résidents, les personnes âgées aussi, n’ont nulle part où aller pour se nourrir convenablement. La majorité d’entre eux n’ont pas de véhicule, la seule option, c’est d’utiliser le transport en commun ou le transport adapté, ou de demander à un ami juste pour se rendre à l’épicerie. Je vais mieux maintenant, mais il y a cinq ans, l’idée de monter dans l’autobus pour aller faire des courses à quelques kilomètres était impossible. Je devais aller au dépanneur où ça me coûtait le double du prix. C’est ce que les gens font.
À La P’tite Maison, une fois par semaine, il y a un kiosque de fruits et de légumes vendus à prix abordables. Pour deux dollars, on a un sac de papier rempli. En ce moment, ce sont des pousses, parce que le programme vient d’être lancé. Mais d’ici la fin de l’été, nous aurons des tomates, des concombres, du céleri, tout. On essaie de mettre en place un système alimentaire avec un jardin, un marché et un groupe d’achat. En plus, quand j’arrive ici, à La P’tite Maison, on s’assure que j’ai de la nourriture chez moi. Si je n’ai plus rien, on m’offre ce qu’il y a dans le frigo ou dans le garde-manger. »
— Darquis